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À quoi bon les sanctions européennes contre la Russie ?

par Sabine Verhest — La Libre Belgique, 4 mai.2021

La Russie et l’Union européenne sont engagées dans un bras de fer dont on ignore jusqu’où il pourra bien mener. Vendredi dernier encore, Moscou a sanctionné huit responsables européens, dont le président du Parlement David Sassoli et la vice-présidente de la Commission Vera Jourova. Il faut bien constater que les mesures restrictives européennes n’ont guère permis d’infléchir la ligne politique et diplomatique russe. La Crimée n’a pas été rendue à l’Ukraine, la paix n’a pas été proclamée dans le Donbass, les ingérences dans les espaces aériens, maritimes et cyber des États membres n’ont pas cessé, la répression s’est dramatiquement accentuée en Russie, des opérations des services secrets russes – empoisonnements, sabotages – ont été perpétrés sur le territoire européen, des diplomates ont été expulsés à tour de bras. Dans ce contexte, à quoi bon les sanctions ?

 

Quelles mesures restrictives de l’Union européenne sont-elles en vigueur ?

Un petit rappel pour commencer. L’Union a progressivement imposé, depuis 2014, des sanctions en réaction à l’annexion de la Crimée par la Russie et la guerre hybride menée dans l’est de l’Ukraine. Ces mesures frappent le pays à plusieurs niveaux. Il y a des mesures diplomatiques et des restrictions à la coopération économique : les sommets Union-Russie ont été suspendus, Moscou n’est plus invité aux sommets du G8, la Banque européenne d’investissements et la Banque européenne pour la reconstruction et le développement ne financent plus d’opérations dans le pays.

Il y a aussi des sanctions économiques ciblant les échanges dans des secteurs spécifiques : elles limitent l’accès aux marchés des capitaux de l’Union, imposent un embargo sur les exportations et importations d’armes, restreignent l’accès de la Russie à certains services et technologies sensibles pouvant être utilisés pour la production et l’exploration pétrolières. Prolongées tous les six mois, ces sanctions sont liées à la mise en œuvre des accords de Minsk – ce qui les rend très difficiles voire impossibles à lever – et ont fait l’objet de contre-sanctions russes (dont on se rappelle qu’elles avaient par exemple eu des conséquences sur l’exportation belge de poires). Il y a également des mesures limitant les relations économiques avec la Crimée et Sébastopol, renouvelables tous les ans, qui prévoient notamment l’interdiction des importations de marchandises en provenance de ces territoires annexés.

Et puis il y a les mesures restrictives individuelles, revues tous les six mois, avec gel des avoirs et restrictions à l’entrée sur le territoire de l’Union européenne, qui visent désormais 177 personnes et 48 entités compromettant l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance de l’Ukraine. Le fait que ces sanctions soient renouvelables « permet plus de flexibilité que l’imposition d’un régime de sanction général », relève Laetitia Spetschinsky, chargée de cours à l’UCL et spécialiste du partenariat euro-russe. « Les sanctions ne sont efficaces que la veille du jour de leur imposition et la veille du jour de leur levée, c’est le moment où il y a un levier d’influence. Le fait de multiplier les moments où la sanction pourrait être levée est une plus-value en termes d’efficacité. »

(…)

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