Les mois de novembre et décembre 2022 sont marqués par une campagne russe de destruction systématique des infrastructures stratégiques visant à briser la résistance ukrainienne à l’orée de l’hiver. Ce développement pousse les capitales européennes à avancer avec détermination sur plusieurs dossiers difficiles et controversés : la création d’un tribunal spécial pour le crime d’agression et la confiscation des avoirs gelés pour alimenter le fonds de reconstruction de l’Ukraine, mais aussi la mise en pratique de l’embargo pétrolier et l’adoption d’un neuvième paquet de sanctions.
Si les crises ont prouvé leurs vertus dans certains cas – en éveillant les consciences et en renforçant les solidarités – la « permacrise » pousse aujourd’hui l’Union dans ses retranchements. Les Vingt-Sept ne peuvent aller plus loin dans la coercition économique l’encontre de la Russie, mais renforcent les mécanismes et appellent à la « patience stratégique ». Sur les enjeux énergétiques et de sécurité, les fractures sont profondes mais l’on perçoit toutefois une volonté ferme de trouver la voie du compromis pour préserver la cohésion. Europe.Russie.Debats passe en revue les différents dossiers qui ont marqué les mois de juillet et août dans les domaines de la coercition à l’encontre de la Russie, de la résilience européenne, du soutien à l’Ukraine, et dans divers autres dossiers d’importance pour le voisinage oriental de l’Union.
Entre le 3 et le 23 juin, l’Union a façonné deux compromis importants – l’un, sur le sixième paquet de sanctions et l’autre, sur les conditions d’une adhésion future de l’Ukraine, de la Moldavie et de la Géorgie. Dans ce même intervalle, elle a subi l’effet revers de ses propres sanctions et la diminution des approvisionnements en gaz qui frappe l’espace européen de Copenhague à Syracuse. A travers la tourmente, l’Union a toutefois réussi à renforcer ses capacités réelles en termes humanitaires, économiques et judiciaires. Recentrage, renforcement et résilience s’imposent en ce début de présidence tchèque comme des priorités vitales pour maintenir une présence utile aux côtés de l’Ukraine.
L’actualité euro-russe du mois de mai est dominée par quatre grands dossiers: le sixième paquet de sanctions européennes qui franchit enfin l’obstacle du pétrole russe, le travail juridique sur la confiscation des avoirs gelés en vue de la reconstruction de l’Ukraine, l’avis de la Commission sur la candidature de l’Ukraine, de la Moldavie et de la Géorgie à l’UE, et l’urgence alimentaire, où les obstacles administratifs et logistiques qui entravent l’exportation des produits agro-alimentaires se doublent d’un combat inégal entre les narratifs européen et russe sur la responsabilité de cette tragédie imminente.
Les massacres perpétrés dans la région de Kiev, révélés le 1er avril à la faveur du désengagement russe, ont déclenché des réponses fermes de la part de l’UE à divers niveaux : au niveau de la coercition économique, au niveau de la lutte contre l’impunité, au niveau du soutien à l’Ukraine, mais également, dans une vision plus globale, au niveau de la résilience de l’Union. Le mois d’avril apparaît rétrospectivement comme un mois de transition entre deux trains de sanctions : celui du 8 avril, qui amorce l’offensive européenne sur les énergies, et celui de début mai, qui vise le cœur – mais pas encore l’écosystème – de la rente pétrolière russe.
Sous le tumulte des menaces réciproques et des bruits de guerre, Europe.Russie.Debats examine les moyens mobilisés par l’UE – et par certains de ses membres – pour éviter l’affrontement militaire. On y décèle notamment le travail de la Présidence du Conseil en tandem avec la nouvelle coalition allemande pour ressusciter le Format Normandie, et le travail toujours discret de la Commission pour aiguiser la résilience de l’Europe et ses moyens de coercition. Plus en retrait de l’actualité, la passe d’armes entre Vilnius et Pékin, et le dossier de l’exportation du potasse biélorusse creusent des sillons profonds dans l’ambition géopolitique de l’Europe.