Les premiers mois de 2023 semblent ouvrir l’ère de la recomposition du monde. Alors que le président Zelensky bataille pour obtenir les soutiens indispensables à la reconquête des terres ukrainiennes – moyens militaires, logistiques, diplomatiques et financiers – le monde semble retenir son souffle. Pékin avance son premier plan de paix, qui est accueilli avec scepticisme en Occident. Et l’Europe, de concert avec ses alliés, ancre la politique de sanctions en nommant un « envoyé spécial international » et en recherchant les moyens, avec le G7, de coordonner la contrainte vis-à-vis des tiers suspectés de soutenir l’effort de guerre russe.
En ces mois de bilan, l’Europe confirme son ancrage au sein du G7, tandis que Moscou et Pékin balisent leur offensive diplomatique au nom des « émergents ». Dans l’œil du cyclone, la scène internationale semble donc bien dessiner les contours d’une nouvelle guerre froide, où, comme par le passé, chaque camp compte ses relais, ses pions… et ses munitions.
Les mois de novembre et décembre 2022 sont marqués par une campagne russe de destruction systématique des infrastructures stratégiques visant à briser la résistance ukrainienne à l’orée de l’hiver. Ce développement pousse les capitales européennes à avancer avec détermination sur plusieurs dossiers difficiles et controversés : la création d’un tribunal spécial pour le crime d’agression et la confiscation des avoirs gelés pour alimenter le fonds de reconstruction de l’Ukraine, mais aussi la mise en pratique de l’embargo pétrolier et l’adoption d’un neuvième paquet de sanctions.
L’annexion de quatre régions ukrainiennes par la Russie, le 30 septembre, a ranimé la cohésion politique de l’Union européenne et ouvert la voie à l’adoption d’un huitième paquet de sanctions alors que les partenaires arrivaient au bout de leurs capacités coercitives. En revanche, sur les dossiers socio-économiques, l’Union ne peut masquer ses dissensions. Les conséquences du conflit touchent désormais le cœur des intérêts européens, comme en témoignent les négociations en flux tendu sur les moyens de protéger les économies nationales. Après 8 mois de guerre, la question fondamentale est de savoir comment maintenir la pression sur le Kremlin, et comment continuer à soutenir l’Ukraine dans la durée.
En ce début d’automne, tous les regards sont tournés vers l’hiver qui approche. Les regards européens, ébranlés par l’absence quasi totale de gaz russe dans leurs usines et leurs foyers. Les regards ukrainiens, qui pensent au terrain bientôt boueux, bientôt gelé qu’il faudra regagner mètre après mètre. Les regards de tous ceux qui pensent que Vladimir Poutine ne « bluffe » pas lorsqu’il brandit l’arme nucléaire pour s’accaparer quatre morceaux de territoire étranger. Le mois de septembre résonne d’un seul mot d’ordre : tenir plus longtemps que l’adversaire. Pour l’Europe, il s’agit de tenir jusqu’à l’épuisement des forces russes qui se démobilisent plus qu’elles ne se mobilisent, ou jusqu’à cette révolution de palais qui ne vient pas (encore) du côté espéré. Pour la Russie, il s’agit de tenir jusqu’à ce que les sociétés européennes, paupérisées et congelées, se lassent de soutenir l’Ukraine. Lorsque tenir une heure de plus que l’ennemi devient une stratégie, le reste — les sanctions, les visas, les enquêtes internationales — devient l’expression de la patience stratégique.
Les massacres perpétrés dans la région de Kiev, révélés le 1er avril à la faveur du désengagement russe, ont déclenché des réponses fermes de la part de l’UE à divers niveaux : au niveau de la coercition économique, au niveau de la lutte contre l’impunité, au niveau du soutien à l’Ukraine, mais également, dans une vision plus globale, au niveau de la résilience de l’Union. Le mois d’avril apparaît rétrospectivement comme un mois de transition entre deux trains de sanctions : celui du 8 avril, qui amorce l’offensive européenne sur les énergies, et celui de début mai, qui vise le cœur – mais pas encore l’écosystème – de la rente pétrolière russe.
L’ouvrage publié par Loïc Simonet en avril 2021 aux éditions A. Pedone (Paris) constitue à ce jour l’ouvrage de référence sur la matière en langue française. Ici, pas de tropisme politique ni d’imprécision glissée sous le tapis pour escamoter les difficultés, mais un travail extrêmement minutieux, de ceux qui se lisent plusieurs fois, et à divers niveaux…
Chaque mois, Europe.Russie.Debats fait le point sur les dossiers qui ont marqué l’actualité euro-russe en prenant soin d’en extraire l’essentiel. N’hésitez pas à nous signaler les faits ou les publications remarquables qui nous auraient échappés, ou ceux qui...
L’ambition européenne de développer une production à l’hydrogène « vert », sur la base d’énergies renouvelables, est-elle réaliste? Si oui, dans quel délai, et au prix de quelle transition? Pour Danila Bochkarev, l’Union européenne devra – pour atteindre son objectif – s’accommoder d’une production intérimaire d’hydrogène bleu (produit à base de gaz naturel) pour accélérer l’abandon des combustibles fossiles tout en évitant des coûts rédhibitoires. Un scenario qui implique une forte dose de pragmatisme de la part de l’UE comme de la Russie… Décryptage.
Il faut bien constater que les mesures restrictives européennes n’ont guère permis d’infléchir la ligne politique et diplomatique russe. La Crimée n’a pas été rendue à l’Ukraine, la paix n’a pas été proclamée dans le Donbass, les ingérences dans les espaces aériens, maritimes et cyber des États membres n’ont pas cessé, la répression s’est dramatiquement accentuée en Russie, des opérations des services secrets russes – empoisonnements, sabotages – ont été perpétrés sur le territoire européen, des diplomates ont été expulsés à tour de bras. Dans ce contexte, à quoi bon les sanctions ?
Le Pacte vert mis en place en 2019 vise à faire de l’Europe le premier continent climatiquement neutre d’ici 2050. Cette initiative climatique s’est heurtée à une résistance farouche de la part des pays dépendants du charbon, et crée un nouveau défi pour la relation euro-russe. Une analyse de Danila Bochkarev.